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The enemy - Lucid Realities

Sciences et avenir | The Enemy, installation en réalité virtuelle à l’IMA

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Changer la représentation de la guerre en mêlant réalité virtuelle et photojournalisme, c’est le défi que s’est donné Karim Ben Khelifa à travers The Enemy. Une exposition hors-norme, qui se tient du 18 mai au 4 juin 2017 à l’Institut du Monde Arabe.

SUBJECTIVITÉ. En guerre, contre qui combat-on ? L’autre, l’ennemi… qui reste le plus souvent un inconnu. Est-il si différent de soi, d’un conflit à l’autre dans le monde ? Karim Ben Khelifa, correspondant de guerre, a voulu confronter ces subjectivités, en croisant nouvelles technologies et outils traditionnels du photojournaliste. Il en a tiré The Enemy, OVNI à mi-chemin entre l’exposition et le récit photojournalistique. Accessible du 18 mai au 4 juin 2017 à l’Institut du Monde Arabe, l’expérience de réalité virtuelle peut accueillir jusqu’à 20 visiteurs simultanés par demi-heure. Le tout dans un espace de 150 m² où l’on se déplace librement grâce aux détecteurs de mouvements qui balisent la salle : une première technologique mondiale !

Un voyage immersif, chaque combattant face à son ennemi

C’est à la rencontre de 6 combattants représentant trois conflits intergénérationnels emblématiques que The Enemy nous invite : le conflit Israélo-Palestinien, le conflit en République démocratique du Congo, et les guerres de gangs au Salvador. Les interviews et prises d’images destinées au projet ont nécessité environ 4 ans de travail, « à raison d’un voyage par an », confie Karim Ben Khelifa. L’enjeu : représenter les soldats interviewés à l’écran, où ils acquièrent une dimension plus vraie que nature (ils sont même programmés pour vous regarder dans les yeux). Les autres visiteurs physiques, a contrario, sont représentés sous forme de silhouettes transparentes.

Pour son équipement matériel, The Enemy s’appuie sur des casques Occulus Rift doublés de sac à dos VR One. Un système de motion-capture (des caméras positionnés dans la salle) complètent le tout. « Le coût de ces équipements est d’environ 2.500 euros pour un casque et une unité centrale mobile, estime Fabien Barati, co-fondateur d’Emissive, qui a assuré la création numérique des contenus virtuels de l’installation. Pour les 20 kits, l’investissement total est donc d’environ 50.000 euros.

La crédibilité de l’expérience doit pour beaucoup à la force des témoignages audio des soldats. Mais le sens visuel n’est pas en reste : chacun des interlocuteurs a été reconstitué en 3D. « Filmer en 3D, c’est possible, mais pas en zone de guerre, poursuit Fabien Barati. Nous avons donc monté un studio photo mobile, afin de saisir 200 à 300 photographies par interlocuteur. De quoi reconstruire ensuite, dans les studios d’Emissive, les formes et les textures, grâce à la technique de la photogrammétrie. Des enregistrements vidéo sous 4 angles ont aussi permis de reproduire correctement leurs attitudes physiques. »

Des algorithmes pour personnaliser l’expérience

Tout commence par un questionnaire qui interroge chaque visiteur sur sa perception et son implication individuelle dans chacun des conflits. C’est là que débute la personnalisation, l’ordre d’apparition des protagonistes étant fonction des réponses apportées. Et ce n’est pas tout : son parcours, sa proximité vis-à-vis de chaque personnage ou encore les moments où il détournera le regard seront soigneusement enregistrés afin d’ajuster la narration (et notamment son étape finale) en fonction du niveau d’engagement perçu. Les algorithmes implémentés sont basés sur les travaux du professeur D. Fox Harrell, fondateur du ICE Lab au MIT et spécialiste de l’analyse du comportement cognitif.

Verdict ? L’immersion fonctionne. « J’ai eu l’occasion de faire tester le dispositif aux 2 belligérants interrogés pour le conflit israélo-palestinien, évoque Karim Ben Khelifa. Après une première réaction de déni, ils m’ont dit, quelques mois plus tard, que oui, dans d’autres circonstances, ils auraient pu être à la place de l’autre. » Mais pour que la personnalisation finale soit pertinente, reste à s’assurer de bien supporter la réalité virtuelle : dans le cas contraire, si un bug d’affichage, une migraine voire une douleur ophtalmique subite vous contraint de détourner temporairement le regard, le programme risque alors de comprendre à tort… que vous vous méfiez de la personne présentée.